«Le thème de cette année, Valoriser les enseignants, améliorer leur statut, englobe les principes fondamentaux de la Recommandation adoptée il y a 50 ans tout en mettant en lumière la nécessité de soutenir les enseignants. […] Les enseignants sont indispensables à une éducation équitable et de qualité et que, à ce titre, ils doivent être « recrutés et rémunérés de manière adéquate, être motivés, jouir d’une formation professionnelle satisfaisante, et être soutenus au sein de systèmes gérés de manière efficace et efficiente, et dotés de ressources suffisantes ».
L’UNESCO, avec les institutions coorganisatrices de la Journée mondiale des enseignants (OIT, UNICEF, PNUD et IE) et l’Équipe spéciale internationale sur les enseignants, dédie cette journée à la célébration d’un engagement intergouvernemental unique, seul instrument normatif international concernant les enseignants, et réaffirme sa volonté de valoriser la profession.»
Les ministères de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur ont lancé le 16 septembre des consultations publiques visant à poser les bases d’une politique en matière de réussite éducative qui couvre trois aspects : les élèves, le contexte et les acteurs du milieu. L’objectif annoncé est de développer une vision commune de la réussite et d’établir des priorités d’action. La consultation se déroulera du 16 septembre au 10 novembre. Des rencontres sont prévues dans les régions à partir du 11 octobre, mais aucune date n’est encore fixée pour le Centre-du-Québec.
La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) plaide en faveur d’«un projet ambitieux pour l’éducation». Dans un document produit récemment, la centrale insiste sur le fait que «l’éducation doit être la grande priorité du Québec» : le gouvernement «doit prendre les choses en main et être à l’écoute des différents intervenants du milieu» afin qu’«une politique nationale de l’éducation [prenne] en considération tout le continuum d’éducation et de formation, de la petite enfance à l’enseignement supérieur.»
Le 9 septembre 2016, la ministre de l’éducation, madame Hélène David, publiait dans le quotidien La Presse+une lettre ouverte sur le projet de création d’un Conseil des collèges du Québec ainsi que d’une Commission mixte de l’enseignement supérieur. Une consultation nationale aura lieu à cet effet du 6 au 14 octobre. Les délais sont bien courts pour mesurer l’ampleur du projet, puisque la date limite pour l’envoi de la demande de participation a été fixée au 12 septembre. Seuls les groupes ayant déposé un mémoire avant le 3 octobre auront la possibilité de participer à cette consultation nationale.
Au mois d’août, la Fédération des enseignantes et enseignants de cégep (FEC-CSQ) a publié dans Le Soleil un avis général sur cette entreprise, mais n’a pas encore, à ce jour, terminé ses consultations internes (auxquelles vous êtes invités à participer par le biais d’un document de synthèse à commenter et à nous retourner). En attendant l’avis de la FEC-CSQ, vous pouvez consultez le billet d’Éric Martin, chercheur à l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS), qui jette un coup d’oeil critique sur la création d’un Conseil des collèges et sur «l’économie du savoir» : «Ce billet traite plus spécifiquement de la création d’un conseil des collèges, en soulevant plus généralement le problème des orientations mal avisées qui dirigent les débats sur l’enseignement supérieur depuis plusieurs décennies.»
Rappelons une autre réaction aux intentions de la ministre, datant de juillet dernier, publiée dans quotidien Le devoir. Sébastien Mussi et Hugues Bonenfant, respectivement vice-président et président de la Nouvelle alliance pour la philosophie au collège, font état de l’intention des libéraux de «réduire l’éducation à l’idée d’employabilité» et défendent «le maintien et la bonification de la formation générale de base actuelle, commune, solide, dont les acquis ne disparaîtront pas au gré des soubresauts du marché et des caprices des investisseurs.»
Le 15 et 16 mars derniers, il y a eu à Montréal le Rendez-vous CSQ de l’éducation. Plusieurs conférenciers et conférencières étaient au rendez-vous pour nous parler de la situation de l’éducation au Québec, mais également au niveau mondial. Cette occasion était un excellent moment pour échanger à propos du système d’éducation et faire part de nos préoccupations. Je vous présente ici les deux présentations d’ouverture et un résumé des deux ateliers auxquels j’ai participé.
MARCHÉ DU TRAVAIL ET ÉCOLE INÉGALITAIRE
M. Nico Hirtt, fondateur et chargé d’études de l’organisation Appel pour une école démocratique en Belgique, nous a présenté une vision très critique de l’évolution du système éducatif en Occident en affirmant que les inégalités dans l’éducation ont augmenté en dix ans. Il a retracé l’historique de cette évolution en rappelant le discours portant sur l’importance de la démocratisation de l’éducation entre 1950 et 1980. Selon lui, 1990 a été un tournant important dans la transformation de ce message. En effet, le message ne porte plus sur l’importance de démocratiser l’éducation pour tous, mais sur l’importance de combler de particulièrement les métiers qui demandent beaucoup de qualification et ceux en demandant très peu. De plus, la défiscalisation fait en sorte que les États financent de moins en moins leurs secteurs publics ce qui a pour résultat que les écoles publiques se retrouvent en compétition entre elles. Le discours, n’est plus de viser une meilleure qualité de l’éducation et de la formation, mais bien de rendre les individus flexibles et capables de s’adapter à un marché en mouvance perpétuelle. Ceci explique pourquoi on retrouve de plus en plus des gens surqualifiés dans des emplois qui demandent peu de qualification. Pour appuyer cette affirmation, il se réfère à ce que l’OCDE a dit : « les programmes scolaires ne peuvent être conçus comme si tous devaient aller loin ». (2001, p.30) En d’autres mots, selon lui, les inégalités dans le système d’éducation ne proviennent pas du dysfonctionnement de l’école, mais bien de sa parfaite adaptation au contexte socioéconomique actuel. L’école est le miroir de la société en quelque sorte.
LES INÉGALITÉS DANS LES ÉCOLES DE NEW YORK
M. Harmon est président du bureau régional new-yorkais de l’Association nationale pour l’avancement des gens de couleur (NAACP) et il nous a informés sur la situation du système d’éducation à New York. Premier constat alarmant, les écoles de New York sont celles où la ségrégation est la plus forte aux États-Unis. Sur le terrain, les quartiers les plus défavorisés à majorité afro-américaine côtoient les quartiers les plus favorisés à majorité blanche. Selon lui, pour briser cette ségrégation il suffirait de permettre aux jeunes des quartiers défavorisés de fréquenter les écoles des quartiers favorisés. Donc, il suffirait de bannir le code postal comme critère de sélection des élèves. M. Harmon mentionne également d’autres solutions et mis en place de nombreuses rencontrent entre les différentes communautés pour mieux comprendre leur réalité et de dénoncer la discrimination quotidienne vécue par plusieurs d’entre eux. Une idée concernant le rôle des suspensions d’élèves, car les élèves noirs sont surreprésentés à ce niveau. En effet, il y a le double de suspensions dans les écoles ayant majoritairement des élèves noirs en comparaison aux écoles ayant en majorité des élèves blancs. En ce moment, dit-il, les suspensions sont perçues comme un congé par les étudiants et ceux-ci passent plus de temps dans les rues. Ne pas être sur les bancs de l’école est un facteur décisif dans la trajectoire d’un individu qui peut l’amener à prendre de mauvaise décision et avoir des conséquences néfastes dans sa vie. M. Harmon, dans cette perspective, fait un clin d’œil à la surreprésentation des Afro-Américains dans les prisons et le fait que les prisons relèvent du privé. Sans faire un lien de causalité, il laisse planer dans son discours que les inégalités entre les écoles permettent de nourrir les prisons. Il désire mettre en place un programme éducatif où la suspension ne devient plus un congé dans la perception des jeunes, mais un outil d’éducation. Malheureusement, nous n’avons pas eu plus de détails à ce niveau, mais cette vision ouvre la porte à une belle réflexion à propos de notre propre système d’éducation.
L’ÉCOLE ET LA RÉALITÉ AUCTHONE
Cet atelier concernait la situation de l’éducation chez les Inuites (Commission scolaire Kativik) et les Cris de Québec (Commission scolaire de l’Estuaire). Sujet très d’actualité lorsqu’on regarde le terrible contexte social dans lequel évolue ces communautés. Il suffit de pensé aux viols et à la disparition des femmes autochtones ou encore le niveau élevé de suicide dans ces communautés. L’atelier s’est déroulé en deux temps. Dans un premier temps, l’invité François Beauchemin, enseignant depuis plus de 10 ans auprès des Inuites au Québec, fait un constat très pessimiste de la situation en décrivant la situation actuelle. Le décrochage est de 80,1 % dans la commission scolaire de Kativik comparativement à 17,4 % dans l’ensemble du Québec. Il mentionne qu’il peut calculer sur ces deux mains le nombre d’étudiants et d’étudiantes qui ont peu atteindre le niveau collégial et qui ont terminé depuis qu’il enseigne dans le Nord-du-Québec. Le manque de ressource dans les écoles, le manque de confiance des jeunes, la rareté de modèles positifs et significatifs dans leur entourage, le roulement du personnel, l’isolement permanent des communautés autochtones, la condition socioéconomique difficile dans laquelle vivent ces jeunes sont tous des problèmes majeurs qui ont des impacts déterminants dans leur éducation. Il mentionne également qu’il y a une grande incompréhension de la culture inuit. Par exemple, le non verbal est omniprésent dans leur culture et un enseignant qui ne connait pas la signification et surtout ne le détecte pas aura beaucoup de difficulté à s’adapter. De plus, il y a très peu d’éléments de politesse dans leur langage, car le langage sert principalement à expliquer l’usage des choses. Ce fossé culturel est souvent la cause des difficultés que vivent de part et d’autre les enseignants et les élèves. L’enseignant (e) doit être à la fois travailleur social, psychologue et un ami dans son travail auprès des jeunes. Le nombre d’années moyen d’une carrière en enseignement avec cette communauté est de 1,2 an. Cette situation fait en sorte que les élèves ont beaucoup de difficulté à s’attacher ou à se confier à eux, car ils sont persuadés que l’enseignant (e) va les abandonner après l’année. En plus de vivre sans cesse des abandons, les jeunes se sentent constamment déchirés entre leur culture d’origine et la culture nord-américaine. Vivant beaucoup de difficulté dans leur environnement social, ils doivent faire des choix déchirants. Soit aider leur famille à se nourrir ou poursuivre leur étude. Plusieurs d’entre eux doivent quitter l’école pour aller à la chasse pour subvenir aux besoins de leur famille. Ceci explique pourquoi moins de 10 % d’entre eux vont décrocher leur diplôme secondaire et que moins de 40 % vont se rendre en secondaire 5. En 3e année du primaire, la langue seconde prend beaucoup de place dans leur éducation et ils réalisent rapidement que s’ils veulent travailler plus tard, ils devront délaisser leur culture et leur langue qui ne seront d’aucune utilité en dehors de leur communauté. M. Beauchemin mentionne également que plusieurs enseignants « boost » les notes des élèves pour les encourager et les garder à l’école. Toutefois, ceci nuit beaucoup à ces élèves lorsqu’ils poursuivent leur étude postsecondaire. Il mentionne qu’au contraire, il faut garder des attentes élevées vis-à-vis d’eux et arrêter de penser qu’ils ne peuvent pas. Toutefois, ce tableau noir laisse place à quelques rayons de lumière. De beaux projets ont vu le jour dans la communauté Cri. Par exemple, le projet InnuRassemble permet à de jeunes Innus de créer en collaboration avec de jeunes Québécois des pièces de théâtre. Par l’entremise d’un projet commun porté par la culture distincte de chacun des groupes, les jeunes apprennent à mieux comprendre la réalité des autres et ainsi brisé les préjugés. L’entraide et le dialogue sont fortement valorisés ce qui permet de combattre les préjugés les uns des autres. L’élément le plus touchant dans ce type de programme concerne la culture. Ici, ce n’est pas l’éducation qui se sert de la culture, mais la culture qui vient encadrer l’éducation. Autrement dit, l’assise de ce projet n’est pas d’éduquer sur la culture de l’autre, mais bien d’éduquer par la culture de l’autre.
LES ÉCOLES DANS LES MILIEUX DÉFAVORISÉS
Cet atelier concernait les écoles en milieu défavorisé. Ici également, on nous a présenté un côté pessimiste de la situation actuelle des écoles en milieu défavorisé qui touche 200 000 élèves ainsi que 1/3 du personnel enseignant, suivi d’un message plus positif et des choses qui ont été mises en place qui ont porté fruit. Il parle dans un premier temps des politiques qui ont été mis en place en lien avec les inégalités dans les milieux défavorisés et les constats de ceux-ci. Premier constat, Jacques Tondreau, sociologue et directeur de l’action professionnelle et sociale à la CSQ, affirme que l’école ne peut pas tout régler. L’école ne peut pas à elle seule éliminer les inégalités qui existent concernant les écarts dans la réussite des élèves en milieux défavorisés comparativement à ceux de milieux plus aisés. M. Tondreau rappelle que le taux de décrochage en milieu défavorisé est de 26 %. Les politiques n’ont pas été un succès, car les objectifs manquaient de clarté et ils étaient trop ambitieux pour la capacité des écoles. De plus, la gestion est beaucoup trop lourde pour mener à bien les objectifs sans compter que les décisions sont concentrées entre les mains des directions. Il faut également prendre en considération qu’il n’y a pas une école défavorisée qui est similaire. Deuxième constat, les politiques d’intervention dans les écoles en milieu défavorisé ont de nombreuses lacunes. La plus grande de ces lacunes est le fait qu’on ne sollicite pas le personnel travaillant sur le terrain. Ce sont les personnes qui connaissent le mieux la réalité et les besoins et on les ignore ou on les sous-utilise. M. Tondreau a également mentionné que des mesures efficaces, dont l’aide alimentaire, ont été abandonnées. Néanmoins, des points positifs ont été apportés dans la seconde partie de cet atelier a fait mention des réussites de certaines écoles en milieu défavorisé. Effectivement, certaines d’entre elles ont permis de faire réussir de nombreux élèves qui avaient des problématiques multiples. Pour que la situation change dans les écoles en milieu défavorisé, le travail doit d’abord et avant tout se faire en amont. Il faut changer les conditions des familles qui sont dans ces milieux et également travailler de concert avec eux.
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