Archives de catégorie : Société

Un guide de la transition traduit en français

«La Transition est une expérience sociale en cours, un mouvement de citoyens qui se rassemblent pour réimaginer et reconstruire le monde en veillant à créer un mode de vie sain. […] C’est un mouvement qui nait en 2005 et ne cesse de prendre l’ampleur. Il est composé de citoyens qui ont décidé d’agir au niveau local pour répondre aux défis majeurs de notre époque. En se rassemblant, ils parviennent à inventer des solutions. Ils favorisent une culture de solidarité qui prend soin de l’individu, du groupe et de la nature. Ils se réapproprient l’économie, stimulent l’entrepreneuriat, réimaginent le travail, apprennent de nouvelles compétences et tissent des toiles de liens et de soutien. Leurs débats sont courageux, les changements qu’ils génèrent sont extraordinaires.»

Le 3 février, le Réseau Transition a publié la traduction française du Guide essentiel de la Transition. Le livret de 64 pages est disponible gratuitement sous licence Creative Commons.

Changer de culture

Plusieurs études montrent que la production de pétrole est soumise à l’épuisement des réserves. La science a aussi montré que la hausse de la température de la planète est le résultat de l’action humaine, notamment de l’utilisation des énergies fossiles. Une chose est certaine : le pic pétrolier comme les changements climatiques nous contraignent à revoir notre façon de vivre.

Bien qu’elles en soient des causes, notre consommation matérielle et notre dépendance au pétrole ne sont pas les seuls objets de cette remise en question. Le changement en cours est si profond qu’il touche nos valeurs, nos besoins, nos relations, nos organisations. Cette transformation ne se passe pas uniquement à l’extérieur de nous, mais aussi dans notre intériorité, et ce ne sont pas les autres qui doivent changer, décider ou nous dire comment être ou agir. C’est à nous tous d’y voir.

Ne pas avoir peur

Cette grande transformation a déjà commencé. Elle apparaît justement dans le « nous » que nous avons en commun. Elle se manifeste déjà là où la pensée est libre, ouverte, transparente et partagée, et elle a pour conséquence d’affecter profondément les structures hiérarchiques traditionnelles. Elle est visible chez ceux qui n’ont pas peur du changement, chez ceux pour qui elle ne provoque pas de colère en raison d’une perte. Certes, la montée des populismes et des extrémismes alimentés par la peur est forte, les défis sont immenses, mais sans la peur, les changements sont globalement positifs. Il est très important de ne pas avoir peur et de nourrir l’espoir. Seul l’espoir donne l’énergie de changer le monde. Ou d’y vivre, tout simplement. Pour quiconque a de l’espoir, tout est possible : nous ne vivons pas le déclin de l’humanité, mais sa renaissance.

La transition

La transition en cours est visible au sein de notre milieu de travail, au sein de l’établissement scolaire où nous œuvrons, le cégep de Drummondville. C’est la raison pour laquelle nous, bureau syndical, avons choisi d’y prendre une part active. C’est la raison pour laquelle nous travaillons avec beaucoup d’énergie à animer notre communauté et à la lier aux autres afin que disparaissent les peurs et que se tissent des liens. Notre cégep est un écosystème fragile au sein duquel nous produisons en commun l’éducation. C’est le premier milieu dans lequel nous pouvons opérer en commun des changements locaux face à des enjeux globaux. C’est dans ce lieu que nos plus petites actions sont le plus susceptibles d’avoir de réels effets à long terme et de porter leurs fruits.

Les prochaines années seront radicalement différentes des années passées. On ne peut plus se préparer à l’avenir de la même façon. Nous travaillons depuis l’automne à l’élaboration d’un plan stratégique à mettre en oeuvre au sein de la communauté enseignante. Les objectifs généraux vous seront partagés ce printemps. C’est un plan audacieux, créatif, innovateur. Nous avons très hâte de vous partager nos rêves d’avenir.

La transition

Un peu partout, chacun trouve des solutions pour relever les défis énergétiques, financiers et environnementaux.

Si nous attendons après les gouvernements, ce sera trop peu, trop tard. Si nous agissons en tant qu’individus, ce sera trop peu. Mais si nous agissons en tant que collectivités, il se pourrait que ce soit juste assez, juste à temps

— Rob Hopkins

 

Manger bio, pourquoi pas ?

Qu’est ce que l’alimentation biologique ?

La culture biologique se distingue de la culture industrielle par ses techniques de production. Elle n’utilise ni pesticides, ni fertilisants ni semences génétiquement modifiées (OGM). La fraicheur des produits permet également une plus grande valeur nutritive. De plus, comme la production provient de la région, elle réduit de façon considérable les impacts négatifs du transport. Bien que la diversité soit évidemment plus grande à l’été, la production est rendue possible toute l’année puisqu’elle est réalisée en serres et en tunnels.

Une collaboration

Le SEECD pourrait développer une collaboration avec une coopérative de solidarité locale qui produit des légumes biologiques toute l’année. La coopérative est membre d’Équiterre et ses aliments sont certifiés biologiques par l’organisme Québec vrai. Notre collaboration serait à l’effet que le cégep pourrait servir de point de chute pour tous les employés abonnés. Enseignants, personnel de soutien, professionnels, cadres, tous auraient la possibilité d’être membres de la coop et de recevoir au cégep un panier de fruits et légumes biologiques. Le panier serait livré dès le lendemain de leur cueillette.

Comment ça fonctionne ?

Plusieurs forfaits sont possibles, selon les besoins des membres, allant du petit au grand panier, avec une variation de prix conséquente et une fréquence également variable. Chaque semaine, à heure fixe, un livreur déposerait les paniers identifiés au nom de chaque membre dans un espace prévu à cet effet au cégep. Les produits seraient propres et contenus dans des sacs réutilisables.

Panier CIHM-été 2015Le contenu de base se composerait de tomates, de laitue (kale et collard, bette à carde, mesclun, épinards) de fines herbes et de légumes racines (carottes, radis, céleri-rave, rutabaga, navet, rabiole). Divers autres légumes s’ajouteraient chaque semaine, selon les cycles : poivron, concombre, chou, courge, brocoli, chou-fleur, chou de Bruxelle, haricot, oignon, échalote, ail et fleur d’ail, céleri, poireau, zucchini, pousses de légume et diverses fleurs comestibles.

Ça vous intéresse ?

Nous aimerions savoir si ce projet vous intéresse avant de poursuivre notre démarche. Un minimum de membres est souhaitable avant de faire du Cégep un point de dépôt pour notre communauté. Ça vous intéresse ? Contactez-nous !

Remettre l’éducation sur les rails

Une douzaine de signataires, retraités de l’enseignement, a publié, dans Le Devoir du 6 janvier, un  texte intitulé «Cinq propositions pour remettre l’éducation sur ses rails». Les auteurs proposent de :

  1. réaffirmer les finalités historiques de l’instruction publique;
  2. cesser le financement public des écoles privées et refuser la sélection sociale par les filières d’élite dans le public;
  3. reconnaître le travail des enseignantes et des enseignants en augmentant leur autonomie professionnelle, leur reconnaissance sociale et leur salaire;
  4. revoir les contingentements dans les programmes d’éducation préscolaire et d’enseignement primaire et secondaire, et hausser les critères d’admission;
  5. refuser d’entonner la litanie ministérielle de la réussite éducative et d’avoir recours à la notion d’excellence en éducation en lieu et place d’une réflexion sur les causes et les solutions aux problèmes du système d’éducation.

Le texte est également appuyé par une quinzaine d’autres enseignants.

L’école à l’examen (8/8)

Décrochage scolaire, formation des enseignants, besoins éducatifs de la société québécoise : le quotidien Le Devoir se penche sur ces questions dans une série de 8 textes intitulée L’école à l’examen, publiée du 23 novembre au 1er décembre 2016.

Le dossier s’ouvre avec le professeur Claude Lessard, ex-président du Conseil supérieur de l’éducation dans une entrevue intitulée «Notre système ressemble à un gros millefeuille», dont voici un extrait :

«Comme ministre, je ferais donc de la réduction des écarts de qualité entre les écoles ma priorité, et je chercherais des moyens efficaces pour augmenter la mixité sociale et scolaire. […] J’articulerais aussi à cette priorité une stratégie d’alphabétisation des adultes, car ces adultes ont des enfants… […] Si l’éducation demeure le meilleur investissement que peut faire une société dans son avenir, au-delà du niveau de ressources nécessaires, il y a aussi leur allocation aux bonnes priorités, ainsi que l’organisation du travail des professionnels de l’éducation qui sont importantes. […] Je propose que l’on explore la possibilité de mettre sur pied au cégep un programme préuniversitaire de culture générale pour les futurs enseignants ; je n’en ferais pas la seule voie d’accès à la formation des maîtres universitaires, mais je l’offrirais à celles et ceux qui voudraient élargir leur culture générale avant de commencer une formation universitaire spécialisée. Cela serait utile, notamment mais pas exclusivement, pour les futurs enseignants du primaire. À l’université, j’offrirais des baccalauréats bidisciplinaires de trois ans, complétés par une maîtrise professionnelle de 45 crédits et pouvant être réussie en un an à temps plein, construite en étroite collaboration avec les commissions scolaires et essentiellement vécue sur le mode de l’alternance. […] Je m’assurerais à toutes les étapes de ce continuum — fin du cégep, fin du baccalauréat et fin de la maîtrise — que les futurs enseignants maîtrisent à l’oral comme à l’écrit la langue d’enseignement. N’oublions pas qu’un enseignant parle constamment en classe ; son efficacité pédagogique est liée à la qualité de la langue qu’il utilise en classe. Ces exigences relevées vont de pair avec une rémunération et une autonomie professionnelles plus grandes. La qualité des maîtres est la variable la plus importante en éducation. Plus ils seront compétents, moins on aura à se soucier de systèmes, de dispositifs et de programmes pour les surveiller et pour réguler leur enseignement.»

Le deuxième article, intitulé «Les réformes, je n’en peux plus», exprime le point de vue de madame Françoise Marton Marceau, ex-directrice d’école. On peut y lire ceci :

«Je favoriserais une vraie autonomie des écoles, y compris pour l’embauche des enseignants par la direction et les conseils d’établissement. Il faut hausser les salaires des enseignants. Ils sont sous-payés. Et si on donne de l’autonomie aux écoles, elles devraient être mieux gérables. […] En plus, j’abolirais tous les examens d’entrée à toutes les écoles, publiques ou privées. Je réserverais les examens d’évaluation pour les fins de parcours du primaire et du secondaire. […] Et puis, j’accorderais une attention à l’architecture des écoles et à l’aménagement des classes. Il est important que les enfants soient plus en contact avec la nature et qu’ils évoluent dans des classes mieux adaptées aux nouvelles pratiques pédagogiques. […] Je pense surtout qu’il devient essentiel de développer une sélection autour des habiletés à avoir comme enseignant. Il faut par exemple examiner la capacité créatrice, mais aussi les habiletés à communiquer, à travailler en équipe, à être empathique. […] Je favorise une année complète auprès d’un mentor. Je crois beaucoup au mentorat dans mon métier. Je mentionne un dernier point de la formation qui concerne la culture et l’ouverture à la culture. […] Mais d’après moi, on ne peut réduire les problèmes du système au seul manque de ressources. Il y a aussi le manque de temps pour réfléchir collectivement sur l’école. Il faut donner du temps aux enseignants, aux professionnels, aux directions pour réfléchir ensemble à ce qu’ils font ensemble. Une école n’est valable que si elle demeure cohérente dans son système.»

Le troisième texte intitulé «On emploie des enseignants, pas des robots» est une entrevue avec madame Margarida Romero, spécialiste de l’intégration des technologies en éducation. Elle déclare :

«[Il faudrait] donner le goût et de développer la culture de l’innovation à l’ensemble des acteurs éducatifs. […] Il faut aimer innover, changer la recette, faire des essais, collaborer avec d’autres personnes, s’enrichir par du réseautage, s’ouvrir pour pouvoir intégrer les aspects de nouveautés. […] Il faut repenser l’école pour que les enseignants, les parents puissent développer des projets qui fassent sens dans leur contexte. Qui soient pertinents et propres à chaque école. Que chacun ait le goût d’innover en tenant compte de sa communauté et ses spécificités. […] Je pense qu’il faut redonner, à un niveau plus local, l’occasion d’aller beaucoup plus loin dans leurs idées, dans leurs projets et aussi dans la diversité. […] Les journées pédagogiques, c’est quelque chose qui n’existe pas ailleurs. Il y a des enseignants qui ne prennent pas ça assez au sérieux et ne les utilisent pas à leur juste valeur. Il y a plein, plein de ressources. [La formation des maitres] est encore dans une approche trop disciplinaire. On forme d’une manière trop traditionnelle. Ça fait en sorte que le goût pour l’innovation n’est pas assez développé chez les enseignants. […] Il faut leur dire que ce n’était que l’épisode initial, que maintenant, on espère qu’ils continuent à se former.»

La série se poursuit avec une entrevue tenue avec avec Michelle Sarrazin, directrice des services pédagogiques au Collège Jean-Eudes, dans ce quatrième texte intitulé Les examens «responsables d’une bonne partie du décrochage scolaire» :

«Développer des méthodes de travail efficaces, exercer son jugement critique, coopérer, communiquer de façon appropriée, mettre en oeuvre sa pensée créatrice, résoudre des problèmes et exploiter les technologies de l’information et de la communication : voilà nos véritables compétences transversales ! […] Sans l’ombre d’un doute, il faudra, par exemple, donner les moyens aux écoles de faire le virage numérique, qui ouvre l’esprit des jeunes à toutes les possibilités, qui les met en action et qui leur donne prise sur le monde, sur leur monde. Surtout, il faut accompagner les directions d’école et les enseignants pour qu’ils s’engagent, résolument, dans leur formation continue, qu’ils soient toujours à la fine pointe de la recherche en éducation, des nouvelles approches pédagogiques, des nouveaux outils à leur disposition. […] Ce qu’il faut, surtout, c’est se donner les moyens d’attirer les meilleurs candidats aux postes d’enseignement : des jeunes gens cultivés, curieux, articulés… Et faire la sélection à la base, comme pour les médecins ! Après tout, les enseignants contribuent à former les esprits ! Et devant tous les défis éthiques, philosophiques, politiques, scientifiques et autres qui attendent l’humanité, nous aurons besoin des meilleurs ! Il faut redonner à l’éducation la place qui lui revient.»

Le cinquième texte est une entrevue avec Normand Baillargeon intitulée «Je ne peux m’empêcher de rappeler le travail de la commission Parent», dont voici un extrait :

«Sans hésiter, ce serait de mettre sur pied ce que j’appellerais une commission Parent 2.0. […] Son mandat serait d’abord de combler cette carence conceptuelle, je veux dire philosophique et normative, qui est la nôtre 50 ans après Parent et après le détournement des États généraux du milieu des années 90. Pour cela, il lui reviendrait d’abord de préciser ce que collectivement nous entendons être l’éducation et les fins qu’elle doit servir. Son mandat serait ensuite de dresser un état des lieux à la lumière de ces finalités. […] Le fait que notre système d’éducation se soit voulu public, une réalité qui est aujourd’hui menacée, est sans aucun doute à préserver et à enrichir. De même, partout où il subsiste, cet idéal d’éducation entendu comme mise en contact avec des savoirs fondamentaux dans le but de rendre une personne autonome et de la préparer à l’exercice d’une véritable citoyenneté par laquelle chacun est un gouvernant en puissance, cela aussi me semble un autre acquis crucial et à préserver. Mais il est lui aussi menacé, à preuve ces attaques contre la formation générale au cégep et, plus généralement, une certaine tendance à l’instrumentalisation de l’éducation. Sur le plan des institutions léguées par Parent, les cégeps et les universités du Québec me semblent, eux aussi, des acquis infiniment précieux. […] [Enseigner] n’est pas seulement un métier ou une profession : c’est une vocation la plus noble qui soit, ceci en raison de la forte portée normative de cette activité. Nous devons aux personnes qui l’exerceront une formation de la plus haute qualité qui soit, avant de leur devoir une reconnaissance collective à la hauteur de leur tâche, laquelle s’exprimera aussi par des conditions de travail enviables. […] Mais ce souhait, comme les autres que j’exprime ici et à commencer par celui d’une commission Parent 2.0, rien de tout cela ne sera possible sans une forte demande du public.»

L’article suivant, le sixième, est une entrevue avec le sociogéographe Michel Perron, de l’UQAR, qui est aussi membre fondateur du Groupe d’action sur la persévérance et la réussite scolaire du Québec. Le texte a pour titre «Le Québec a besoin d’une véritable politique nationale en éducation». Voici des extraits :

«Les deux mots qui seraient au coeur de mon discours, ce serait territoire et conditions de vie des élèves. Un virage doit être pris pour que le système d’éducation soit moins bureaucratique et plus adapté, mais surtout plus adaptable aux réalités territoriales. Le Québec, c’est un immense territoire avec des fractures sociales, économiques, culturelles et territoriales dont on ne tient pas beaucoup compte en éducation. Les besoins diffèrent d’une région à l’autre, mais également d’un quartier à l’autre, surtout dans les milieux urbains. De ce mandat principal, je ferais deux chantiers : d’abord revoir le mode d’allocation des ressources pour tenir compte des réalités de terrain comme on le fait dans le domaine de la santé par exemple, et  donner plus de pouvoir aux écoles et plus d’autonomie aux chefs d’établissements. Il faut mettre fin à la vision électoraliste et à court terme que nous avons depuis vingt ans. Depuis 1996, je crois que j’ai rencontré les 19 ministres de l’Éducation qui se sont succédé. Le Québec a besoin d’une véritable politique nationale en éducation. Je comprends que ce que le ministre fait, c’est un pas dans la bonne direction [mais] il faut que ça s’inscrive dans une démarche plus large. Avec le groupe d’action sur la persévérance scolaire, on travaille justement à lancer une politique nationale en éducation au Québec, une politique élaborée sans partisanerie politique et proposée par la société civile avec l’appui de tout le milieu. […] Enfin, dans les travaux récents, on s’aperçoit que la distance au cégep le plus proche est aussi un facteur de diplomation au secondaire. Quand les élèves savent qu’il y a un cégep près de chez eux, ça les encourage à poursuivre leurs études. C’est une preuve de plus, s’il en fallait une, qu’il faut absolument que notre réseau des cégeps soit maintenu. [Il] faut travailler sur la formation continue des professeurs parce que les connaissances avancent rapidement. Il faut absolument permettre aux professeurs de se renouveler pour pouvoir innover, ce qui suppose des mécanismes avec du financement. Il faudrait également favoriser le mentorat pour les professeurs du primaire jusqu’à l’université. […] Beaucoup de jeunes professeurs découvrent la complexité des conditions de vie des élèves quand ils arrivent sur le marché du travail, et là, il y a un choc culturel.»

La septième entrevue est réalisée avec Mathieu Côté-Desjardins, ancien enseignant au primaire. L’article est intilulé «L’éducation comme un moteur de société». En voici quelques extraits :

«[Il faut] démontrer simplement et efficacement la mystification qui s’est faite par le ministère de « la déséducation » depuis les dernières décennies. […] J’engagerais l’ancien professeur Pierre Demers, qui est l’auteur d’une série en quatre tomes sur l’éducation humanisante. Il propose d’utiliser l’éducation comme un moteur de société. Il explique comment bâtir du sens nous ramène à la racine de ce qu’est « éduquer » pour avoir un impact autant dans la famille que dans la société. Il faudrait en outre complètement revoir la formation des maîtres. […] Peu importe la quantité d’argent lancée au problème, tant qu’on ne retourne pas à la racine de ce qu’est « éduquer », on ne peut rien vraiment accomplir qui vaille quelconque mention. Je parle, par exemple, de retrouver une sensibilité pour l’enfance, sur ce que cela signifie pour la vie et l’importance de la vivre pleinement, de préserver à tout prix la capacité d’émerveillement des enfants, de donner tout l’oxygène nécessaire à la créativité et à l’imaginaire des jeunes, ou encore de cesser ce génocide de « génies » dans les écoles, etc. […] D’abord, un système de sélection sur la base de notes scolaires ne devrait même pas être considéré, ni même être perçu comme novateur. Au contraire, il s’agit d’un moyen on ne peut plus obsolète, tout comme son diplôme qui suivra, ce qui laisse passer entre ses mailles beaucoup… beaucoup trop d’individus n’étant point dignes d’être en contact avec des jeunes. […] De plus, il faut s’assurer que le système favorise les « maîtres » ayant un grand sens critique, tout en ayant une d’ouverture d’esprit considérable. Ces deux axes sont primordiaux. Actuellement, le système scolaire nourrit, entretient et protège le contraire, et ce, à tous les niveaux.»

La dernière rencontre a lieu avec Lise Bisonnette, ancienne directrice du journal le Devoir et fondatrice de la Grande bibliothèque, dans un article intitulé «Pour arriver à une compréhension du monde», où l’on peut lire les extraits suivants :

«Nul ne devrait être admissible au titre de ministre de l’Éducation sans pouvoir, à huis clos et sans aide, exprimer sa conception de la lutte contre l’ignorance contemporaine. […] Nous avons ainsi obtenu, sans tableau blanc, une leçon magistrale pour ministre : l’éducation n’est pas un simple outil de développement économique et d’accès à l’emploi, elle devrait être une démarche pour arriver à une compréhension du monde, de son histoire, de son présent et de sa destination. Et nul ne devrait être admissible au titre de ministre de l’Éducation sans vouloir proposer ou imposer à son gouvernement l’obligation première de reconnaître formellement qu’on éduque pour éclairer, et non pour fournir du travail de cadre ou d’ouvrier dans une cimenterie soumise aux aléas du libre-échange avec les États-Unis. […] Quand on accepte la charge de gouverner, ce n’est pas pour faire arriver les trains à l’heure ou, en éducation, pour obtenir des résultats présentables aux tests internationaux. La raison d’être de l’État, c’est d’empêcher la loi du plus fort de régir la vie en société. Nous naissons tous égaux, certes, mais les inégalités s’installent dès notre premier souffle. Le système d’éducation est la première ligne de résistance à cette adversité, qui n’est pas une fatalité. […] La tâche de l’école n’est pas d’abord de multiplier les sorties en vue de former les futurs consommateurs de produits culturels, comme le réclame un milieu associatif affamé. Elle est de donner accès, d’offrir en propriété, les références culturelles, scientifiques, historiques qui permettront à chacun de penser sans recourir au téléphone. […] L’éducation devrait être la première dépense de l’État, la santé accapare tout faute d’éducation. Efficacement socialisés par le langage de la rigueur et de l’austérité, nous cherchons pourtant à éloigner de nous le calice de la dépense et, dociles, à nous prescrire de faire mieux sans avoir plus. En attendant un revirement improbable de l’ordre des priorités, il faut dénoncer les ravages scandaleux de la pingrerie durable.

L’éducation : une solution à prioriser

Dans l’édition du 30 novembre 2016 du quotidien Le Devoir, Bernard Tremblay, président-directeur général de la Fédération des cégeps, écrit que «ce n’est pas parce que nos dirigeants réitèrent constamment l’importance de l’éducation dans leurs propos que celle-ci se maintient toujours en tête des priorités des citoyens et du gouvernement.» Pour lui, il est temps de passer de la parole aux actes. M. Tremblay ajoute :

«La démonstration n’est plus à faire : l’éducation est la solution à plusieurs problèmes actuels et futurs. Pauvreté, exclusion sociale, problèmes de santé et problématiques sociales, entre autres, trouvent une grande partie de leurs solutions dans l’éducation. […] Pourtant, malgré tout cela, les choix budgétaires des dernières années ont fait excessivement mal. Les cégeps ont pour leur part écopé de compressions totalisant 155 millions de dollars et le réinvestissement issu du dernier budget et de la récente mise à jour économique ne représente qu’une réponse très partielle aux problèmes croissants qui affligent notre système d’éducation. Tout ne passe pas par l’argent, mais cessons de dire qu’on peut faire mieux avec moins ! […] Devant cette multiplicité d’enjeux, l’éducation doit non seulement être une priorité gouvernementale, elle doit aussi être portée par tous les acteurs de la société. Si tous les parents, les employeurs et les acteurs sociaux unissent leurs voix pour la valoriser, nous retrouverons possiblement cette valeur partagée et ferons face aux besoins qui s’annoncent avec la nouvelle révolution industrielle qui est à nos portes.»

Guy Rocher appelle à une profonde réforme en éducation

Le sociologue Guy Rocher, ex-membre de la commission Parent, réagit au rapport du Conseil supérieur de l’éducation. Dans une lettre ouverte publiée dans le quotidien Le Devoir, intitulée «Une profonde réforme s’impose en éducation», on peut lire :

«Le CSE est-il trop critique ? En demande-t-il trop ? Je ne le crois pas, au contraire, des enseignants se sont déjà engagés sur cette voie, et d’autres attendent qu’on les y invite. De toute façon, par définition, un virage pédagogique ne se fait pas sans les enseignants, encore moins contre eux. Il faut plutôt qu’ils soient associés à sa conception comme à sa réalisation. Ce sont plutôt des valeurs d’équité et de justice auxquelles il faut revenir, pour contrer un climat généralisé dans la société d’aujourd’hui de marchandisation et de consommation de l’éducation, comme tout le reste.»

M. Rocher conclut : «Il faudrait donc que de nombreux enseignants et beaucoup de parents aient en main cet important Rapport 2015-2016 du Conseil supérieur de l’éducation».

L’éducation, un bien commun ?

Irina Bokova, Directrice générale de l’UNESCO, estime que

«l’éducation doit enseigner comment vivre sur une planète sous pression. Elle doit viser l’alphabétisation culturelle, sur la base du respect et d’une dignité égale pour tous, et contribuer à tisser ensemble les dimensions sociale, économique et environnementale du développement durable.»

C’est dans cette optique de développement que

«l’éducation et le savoir doivent être considérés comme des biens communs mondiaux. Cela signifie que la création des connaissances, leur contrôle, acquisition, validation et utilisation sont communs à tous les êtres humains en tant qu’effort collectif social. La gouvernance de l’éducation ne peut plus être séparée de la gouvernance du savoir.»

Voilà les principaux enjeux que pose l’UNESCO dans le document «Repenser l’éducation; vers un bien commun mondial?». Cette réflexion pose d’importantes questions sur les enjeux de l’éducation au XXIe siècle. Dans le contexte actuel, où les sociétés sont en pleine transformation, quels sont nos besoins et quelles devraient être les finalités de l’éducation? Comment celle-ci devrait-elle être organisée?

Il s’agit de notre avenir commun. Et l’avenir commence ici maintenant. Localement, dans notre cégep, comment peut-on faire valoir et protéger ce bien commun et comment peut-il être organisé? Voilà un important chantier qui mérite d’être entrepris.

«Avant le déluge»

Avant le déluge est un documentaire de Fisher Stevens, produit et narré par Leonardo DiCaprio. Le film, d’une durée de 1h35, porte sur les changements climatiques. Le titre fait référence à un triptyque du peintre Jérôme Bosch (1450-1516), intitulé Le jardin des délices. La peinture, composée de trois parties, décrit le paradis et l’enfer. Entre les deux se trouve l’oeuvre qui a inspiré DiCaprio et qui représente, à ses yeux, l’époque contemporaine.

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Le documentaire, diffusé gratuitement en ligne du 30 octobre au 6 novembre, a été vu par 45 millions de personnes. Il est encore disponible sur différentes plateformes.

Rappelons que le SEECD a pour projet d’organiser, la session prochaine, une journée de réflexion sur le thème de l’avenir avec l’intention de trouver des pistes de solutions communes applicables dans notre milieu de travail.